II) Journal

Oui, aujourd’hui, j’étais à l’hôpital pour comprendre mes phlébites à répétition. De même je réfléchis à pourquoi le médecin m’a dit que je devais être quelqu’un de « brillant » ? Le mot reve-nait souvent, la doctoresse avait l’air d’en savoir plus sur moi, sur mes livres que moi. Un grand mystère à élucider. C’est comme si elle avait des données numériques que je n’ai pas autorisé qui que ce soit à avoir sans qu’on me rétribue : mes livres, mon temps sur l’ordinateur n’est pas gratuit (et encore moins sous-payable avec une « couille » d’AAH. Excusez, ma seconde mère et ma tante, le terme, mais j’ai deux couilles, je mériterais le double (le SMIC), pas pour partir à l’étranger mais pour produire plus de livres (car j’aime ça et il y en a trop à écrire, qui se renouvellent).

Pour quelqu’un qui serait « brillant », je res-sens cette limitation financière, comme pour mieux me censurer, ou à l’opposé me faire produire des créations plus denses encore, ou encore sans style avec plein de mots sans sens à la place de chiffres, alors qu’un tableau parfois parle plus.

Malgré tout le respect qu’on m’a donné ce matin après ma nuit blanche, ça sent l’exploitation, on m’a pris, d’après Kiki, qui n’a pas la mémoire des chiffres impairs (dyslexie), vingt-trois flacons de sang. Moi, j’aurais plutôt entendu vingt-sept… Et ça allait quand même bien grâce au VSL rassurant, avec l’ambulancière.

C’est intéressant aussi de voir comment la doctoresse a démarré sur les chapeaux de roue, est sortie, a lu une info sur la bonne manière de prendre un schizophrène, ou elle s’est pris du LSD, ou les deux. Si c’est le cas, elle devrait partager son salaire avec une autre, car elle a très bien bossé, mais la file d’attente devait augmenter.

Comment faire comprendre à un médecin qu’il n’a pas l’exclusivité de ses connaissances et devrait diviser son revenu en deux pour AUSSI penser à sa santé physiologique, comme ses métabolismes ? Même son bureau pouvait être aménagé en transformant deux trop grandes salles, faire trois moyennes, ou au moins un aménagement (toilettes, accueil…) handicapé.

Par contre, le fauteuil pour la prise de sang supporterait quelqu’un de deux cent cinquante kilos, mais pas l’entrée de la personne à la porte, pas du point de vue du poids, mais de la largeur, en cas d’obésité. Moi, c’est cent dix, elle a dit cent huit, je l’ai corrigée, j’ai mes yeux, contrairement à Christelle…

Dans cette ville, les médecins sont peut-être efficaces, mais les locaux vétustes, et le personnel est, je pense, plus dopé que moi, il devrait être autorisé à vapoter.

Bon, je mets ça sur LinkedIn, j’ai apprécié la doctoresse, mais elle devrait se faire assister, pas par chimie, hélas elle se croit, je pense, trop nécessaire et va y laisser sa peau ! Ne pas le lui dire est de la non-assistance à personne en danger. 

Bisous, ma tante et ma seconde mère Annette, oui, vous Existez de façon importante pour moi.

Maman va rentrer de l’hôpital où elle était avec papa, comme chaque jour. Elle devrait y aller tous les deux jours, elle serait ainsi moins stressée.

 

À Notre Amie Annette :

Fatigué, un peu froid, la grosse prise de sang, on sent que cet hôpital est vétuste et manque de moyens : au moins vingt-trois grands flacons pris et même pas un jus d’orange au bout… Il est vrai, comme dit Christelle, que nous avons pensé à apporter du lait et du café, même si ça les a fait sou-rire.

Oui, Kafka, je n’ose le lire, ça doit être romancé. Je réalise qu’au bout de neuf ans, concernant l’argent, on n’a pas évolué, Christelle ne me fait pas confiance, elle ne veut pas s’imposer pour le symbole auprès de sa curatelle : neuf ans après, je vois que la confiance de Kiki pour moi, c’est : zéro ! J’ai le sentiment qu’avec elle aussi, j’ai perdu mon temps. Elle mesure la différence entre six mille deux cent vingt euros et quatre cent quatre-vingt-neuf euros, pourtant.

Je prévois de quitter La Flèche et si Kiki m’aime comme elle le disait : « j’irai te chercher… » Eh bien non, Jeannette, il faudra que tu me suives et que, moi qui t’ai donné la confiance en les curatelles, il faut que toi, tu te choisisses un mari, un vrai, je te mets au défi de trouver mieux. Comme un idiot, j’ai encore cru à l’amour, elle m’a utilisé comme toutes et je découvre une radine derrière ces quatre cent quatre-vingt-neuf euros que j’aurais redistribués avec elle.

Déception.

(Trop troublé par les silences de ma-dame Coul, considérant, moi-même, Internet comme créé pour les affaires ou urgentes, ou importantes, ou les deux, ici c’est urgent, c’est un affront pour moi. Je pense et je l’écris, devenant intérieurement en colère, ne maîtrisant plus.)

« Je planifie le départ, de toute façon, ce n’est même pas moi qu’elle veut, c’est la maison de mes parents et un pigeon pour l’entretenir.

Comme dit B. Fontaine (que je n’aime pas), “l’amour, c’est pour les gogos”.

Je ne lâche pas la maison de notre chaton Bi-joues tant que le chat Chaussette de mon père n’est pas décédé. Ce sont mes deux fistons. Chris-telle, qui a l’habitude de se faire servir, m’a donné un Ordre, aujourd’hui. Christelle avait peur des chats, avant, il faudrait que je la morde….

Tout cela va être dur, mais pas plus qu’un discrédit.

J’ai pris quinze kilos pour rien ou presque, Christelle, voyant mon corps déformé, se décide enfin à aller à la piscine.

Moi, j’ai un déménagement en vue : encore une nouvelle vie, faut être perspicace pour retrouver l’amour, redonner sa confiance “coûte que coûte”. Mais si l’amour, ça se cote à quatre cent quatre-vingt-neuf, pas à six mille deux cent vingt… c’est que l’équivalence n’est pas là.

Pour ne pas être pris pour plus con que mon père, je suis pris pour plus con que ma mère. Excuse-moi, maman, je ne suis pas ton fils pour rien : on est des gros pigeons.

Ma chère Kiki, on n’est pas du même sang et on n’a même pas d’enfants.

Tu mettais toujours tes chaussons au moment de sortir, tu es autant factrice de graisse que de matière grise.

Ce soir, je ne sais plus si je t’aime, je ne t’en sens pas digne. Tes bravoures, tes circonstances atténuantes me paraissent traîtrise. »

Après qu’une excellente amie m’a fait pleurer de soulagement, à la retrouver Belle et bien dans sa peau ; après que Zigmus, mon clown préféré, avec ses blagues cocasses toutes faites pour moi, mon clown au cœur immense, m’a fait rire en pleine nuit d’un large rire intérieur ; je résonne : j’ai déjà fait pleurer cette amie de tristesse il y a vingt-six ans pour une question de cultures trop différentes, je ne peux ni ne dois recommencer avec Kiki, ma Kiki, mon p’tit clown juste parce qu’elle ne vit pas ce que je vis, qu’elle ne le vit pas de Ma culture.

À mon tour, je pense vis-à-vis de ma Kiki : « même si on se fâche, je t’aime ! »

La force d’un couple va au-delà des administrations.

 

À mes Amis Micky et Annette :

Pas d’inquiétude je me suis couché ce matin en disant à Kiki que je l’aime, elle m’a répondu qu’elle aussi, mais un peu triste.

Là, mon p’tit clown est parti à son association de consommateurs, moi, j’ai dormi huit heures, je sais que je resterai troublé par les évènements derniers et le silence de Madame Coul. Je dois tourner les pages et penser à ma santé, les événements d’hier ont été trop troublants.

Madame Coul ne fait pas son boulot, elle fait du zèle à mes dépens.

Oui, ça serait dommage de gâcher tout ça, il faut (encore) comprendre que Christelle a ses handicaps et d’autres handicaps qui en découlent (ELLE NE COMPREND PAS L’IMPORTANCE SYMBOLIQUE DE CET ARGENT POUR MOI ET JUSTEMENT, C’EST MOI QUI PERCE L’ABCÈS TOUT SEUL. JE M’EN FOUS DE CE FRIC (JE M’EN FOUS D’AVOIR FUMÉ 1000 (un millier de) CLOPES LÉGÈRES PAR MOIS PENDANT CINQ ANS ET C’EST MOI QUI DONNERAI TOUT À MA CONJOINTE, SANS INTERMÉDIAIRE et en espèces !), j’aime la difficulté, pour la vaincre, il faut que je m’invente d’autres méthodes et que je prenne de la graine de Kiki.

T’inquiète pas, cette nuit j’ai rêvé que je mangeais de la salade crue (presque avec les che-nilles) : je vais me comporter en pachyderme.

Il y a trop d’évènements douloureux ou troublants, il faut que je broute dehors.

Je me lève bien + Kiki me manque.

Mille bisous,

Pierre

 

Annette me répond :

Oui, je comprends ce trouble et beaucoup dans cette société ne se rendent pas compte à quel point le trouble causé par de telles embûches sur la route peut déstabiliser gravement.

Tu résistes et tu inventes des méthodes, j’admire, et surtout cette phrase qui me ravit chaque fois : « prendre de la graine de Kiki » !

Oui, pense à ta santé, mais si tu manges trop d’herbe crue, ne deviens pas un ruminant, ruminer ses problèmes n’aide pas à les alléger, mais ils restent sur l’estomac !!

Bise,

Annette

 

J’ajoute pour Micky, notre meilleur ami :

Non, je ne reproche pas à Kiki d’aller à la piscine, je lui reproche d’avoir beaucoup trop tardé, d’avoir eu besoin de nous voir au non-retour du point de vue du poids pour réagir, je crois qu’elle ne l’analyse pas, d’ailleurs : ce n’est pas grave, l’important, c’est qu’elle y aille.

T’inquiète, si tu peux expliquer à Kiki ce qu’est un geste symbolique, ça m’aidera, si elle peut le comprendre : comprendre comment prouver par cet argent, par ce crédit, que l’on doit s’accorder mutuellement sur la gestion des finances, que l’on se fait confiance, « se donne du crédit », de la valeur, de la crédibilité.

Oui, autrement, tu as raison sur toute la ligne, mais Kiki n’est pas mature et on n’achète pas une maison quand on n’est pas mature. Moi-même, je ne me sens d’ailleurs pas prêt.

Je mets une copie, sans complexe, à ma-dame Coul, si elle veut faire du zèle : qu’elle écrive. Kiki veut qu’elle se déplace, et si c’est ça, ce ne seront pas des mots mais un ton autoritaire, pas d’accord, C’EST NOTRE COUPLE ! On ne va pas non plus gâcher les 1,5 % supplémentaires et inutiles dans des frais de transport. Qu’elle se bouge du cerveau ! Ce n’est pas moi qui ai mis Kiki en protection judiciaire et j’épouserai une femme ADULTE ! Ça ne suffit pas d’avoir acheté des alliances pour prouver qu’on est un couple. 

Allez, je n’ai pas mangé ni fait ma toilette, « ch'suis comme un cobaye » (Soleil cherche futur et « les dingues et les paumés », Paroliers : Hubert-Félix THIEFAINE / Claude MAIRET)

Excuse-moi, Micky, je sais que tu peux tout comprendre, mais ma position est incommensurable. On me pousse à la folie alors qu’il devrait être question de tendresse. Ce n’est pas un jeu, l’amour, et je ne sais pas à quoi madame Coul joue, avec ses silences !!!!

Pierre

 

J’écris à Madame Coul.

Christelle est en train de vous faire un cour-rier, d’elle-même (sur Word).

Je ne sais pas si elle comprend le côté symbolique, déjà, elle comprend qu’il y a des principes et elle me dit qu’elle a peur de me perdre (je ne le lui ai pas encore dit, mais moi aussi) (je lui mets la copie de ce courriel car, maintenant, elle dort).

Elle a d’elle-même écrit les impôts de mon homme, c’est donc moi qui en décide et rassurez-vous, elle aura sa part pour récupérer sa dignité et s’acheter un jour son scooter cash, sans rater une occasion (on s’est simplement fait DOUBLER).

Voilà, elle vous a écrit de sa propre adresse mail, vous qui ne répondez pas aux miens, désolé pour les complications, mais votre excès de zèle méritait le mien, à part que l’injustice, c’était moi qui la vivais : on en a marre de faire nos preuves face aux « n » curatelles, qui disent qu’elles vont rester, et qui en fait se divisent et divisent ! Si votre quota pour arrêter de nous tester est de dix ans, écourtez d’un an !!

Je pense que le cerveau de Christelle ap-prend, malgré tout et au contraire grâce à tout, je pense qu’elle verra un jour un symbole autre que le donner surtout à une maison, elle sait déjà ce qu’est : sauver un foyer, un couple, au présent.

Cordialement,

Pierre

PS : je l’aime.

 

-Bonjour madame Go,

Si j’ai bien compris votre demande, vous souhaitez rembourser les quatre cent quatre-vingt-neuf euros à monsieur Grand, la somme totale.

Je peux effectivement modifier et procéder au versement de la somme de quatre cent quatre-vingt-neuf euros.

Je transmets la demande au service facturation aujourd’hui, ce sera mis au paiement en début de semaine prochaine.

Cordialement, 

Madame Coul pour l’AT

 

-Merci Christelle, excuse-moi pour ton amour propre, mais moi aussi, j’en ai. Normalement, tu auras les espèces en fin de semaine, je pense que cela sera une liberté, un jour, de gagnée, que tu réclamais il y a longtemps et que tu auras sans tricher.

Pierre 

 

-Merci Madame Coul,

Cordialement 

PS : merci d’être allée aussi vite (me concernant).

Madame Go Christelle